dimanche, décembre 28, 2008

Après la tempête, so calm...

Verrine de saumons en duo



Foie gras mi-cuit et son pain d'épices maison



Pavé de biche braisé






Désespérément pas de tempête en Bretagne, donc.

Une lumière de dingue baigne la bouffe familiale et les quelques ballades.

Et je vais sérieusement peut-être songer à me transformer en photographge gastronomique (si en plus ça me permet de bouffer à l'oeil...).

Ou pas.
























La chanson con bretonne du moment avec les fameux Oldelaf et Monsieur D




Et si t'as rien de mieux à faire que de baver devant les trois premières tofs, va donc faire un tour par là, c'est pas tous les jours qu'une chouette hauteur de l'auteur de polar comme ça bloggifie.

dimanche, décembre 21, 2008

LA-GRECE-DES-CAVERNES

« Brûlé de plus de feux que je n’en allumai…. »

Jean Racine, Andromaque.





Ne rien avoir rapporté.

Sinon la joie.

Ne rien avoir emporté non plus, à l’heure de monter dans l’avion, lois d’exceptions permanentes, mesures anti-terroristes, quand un livre devient une pièce à charge et le numéro de téléphone d’un ami étranger la preuve d’un complot international.

Ne pas avoir pris de notes, pendant ces quatre jours, des fois que… Ne rien avoir rapporté, sinon ces souvenirs aussi brumeux que les lacrymos faisant pleurer Athènes.

Ces nuits où la Grèce n’aura jamais été aussi belle du deuil et de la rage, de la fureur et du mystère, du silence et des flammes.

Athènes dont le plus beau marbre est celui jeté à la gueule des porcs assassins d’un gamin de quinze ans, d’un avocat véreux, d’un Etat qui vacille. Athènes où les applaudissements éclatent en même temps que les vitrines. Athènes qui brûle pour Alexis et s’en fait une joie.

Les heures égrènent les vingt gosses de treize ans aux couleurs du PAO, de l’Olympiakos et de l’AEK attaquant ensemble une prison, la grève de l’Acropole, les bouteilles vides qui attendent, les camarades italiens devant Polytechnique, les trottoirs défoncés à coups de barre à mine, les carcasses des bagnoles cramées une troisième fois pour une énième barricade, les motos qui tournent sans fin pour chouffer les keufs, les hélicos qui tournent sans fin pour surveiller la ville, le rire des amis, l’odeur des lacrymos importés d’Israël, les discussions sans fin dans la douceur des orangers.

Et puis nos doutes, aussi, de pauvres petits français peu rompus à une telle guerre de rue. Blanqui a sans doute plus essaimé à Athènes qu’à Paris. Quoi que, par certaines nuits d’un novembre 2005…

Tends-moi ton Molotov, camarade, saurai-je m’en servir, ne tremblerai-je pas, et ces français que je ne connais pas qui sont à nos côtés, tends-moi ton bras et ta confiance, tends-moi ta force, je ne ferai rien ce soir, tends-moi ta joue que je m’excuse et je t’embrasse, camarade et ami.

La vie, la mort, tout ça, l’insupportable combien de gosses tués sous les balles d’un flic pour combien de flics tués. L’addition, s’il vous plaît.

La première manif, sac encore sur le dos, et des slogans comme un chœur de l’époque où ça inventait le théâtre et le monde. Ça monte des tripes, violent, décidé, le chœur chasse les quelques keufs qui osent se pointer sur le parcours. Les pierres volent déjà, la ville est à nous, nous sommes au monde, plus de théâtre.

Retrouver son chemin, lampadaires dépavés et trottoirs éteints, quelques verres de blanc pour la route, les poubelles crament aux carrefours, des cris au loin, les gaz, le feu. Ce vieux qui demande ce qu’on en pense en France ; à Paris… Lui, comme tout le monde il est d’accord pour que les banques soient attaquées, pillées. Rendues au néant.

Une fac occupée et retrouver les amis, comme une évidence. Etre là, simplement, parce qu’il le faut, parce qu’ils l’auraient fait dans l’autre sens, ou, à tout le moins, ils auraient brûlé un consulat si ça avait pété un peu chez nous. Pour la forme.

N’avoir rien à apporter, sinon notre joie d’être là, au milieu d’eux, au milieu de cet autre Alexis de quinze ans qui parle pour la millième fois de la mort de son pote, qui est devenu un symbole malgré lui, que tout ça dépasse bien au-delà des mots, il n’y a plus de mots d’ailleurs ; juste une ville qui vit d’embrassades, de retrouvailles et de banques qui flambent.

Une AG de 300 personnes où la parole circule, fluide et pure, où le langage signifie vraiment le monde et une forme de réel ; ça devait être comme ça, il y a plus de deux mille ans quand ils inventèrent le monde. Atavisme. Tradition. Ou héritage. Et quand bien même ils s’en défendent.

Le lendemain, manif à 13 heures. Les pierres pleuvent dès midi. Des gosses de treize ans chassent les keufs. L’impression de mourir et d’avoir à gerber ses poumons sous les lacrymos que l’Etat grec achète directement à l’armée israélienne. De l’incapacitant que les masques à gaz peinent à filtrer. Coude à coude. Bras à bras. Dans le rudoiement des gaz, les pierres redoublent.

J’apprends plus tard que la manif était soft, pas de cocktails de sortie car il fallait laisser aux étudiants le choix des armes. Ceux-ci avaient juste choisi les pierres, afin que tout le monde puisse participer, le plus naturellement du monde.

Passage par Polytechnique, rumeurs et fausses alertes. Les cagoulés chargés de Molotov veillent à la porte, la lune monte entre les colonnes grecques d’un bâtiment, un feu crépite. C’est la guerre, mondiale, civile et locale, la tension maintient en éveil. La guerre pour la seule cause qui vaille. C’est l’épreuve.

Nouvelle AG à la fac. Toujours autant de monde. Attaque-t-on ce soir ou demain. Ce sera demain. Dormir un peu, voir les amis. Parler. Refaire encore une fois ce monde que nous sommes en train de créer.

Le samedi, une semaine depuis qu’Alexis a été assassiné. Une AG où la parole se tend, les objectifs se précisent et les groupes se forment. Regards, coordination, l’organisation trouve ici son aboutissement. Un minimum de risques pour un maximum de dégâts. Les poings se serrent, tapent sur l’épaule.

Embrassades.

Capuches.

Cent cinquante à bouger, autant à protéger.

Cagoules, gants, écharpes, masses, pavés, cocktails.

Sous chaque masque noir, il y avait un sourire, dans chaque pierre lancée, de la joie, dans chaque corps révolté, il y avait du désir.

Tends-moi ton Molotov, camarade, ce soir je ne fais rien et je t’embrasse. Je suis auprès de toi.

Athènes brûle et s’en fait une joie.

Plus tard, dans Exarchia, la fumée sans qu’on sache s’il s’agit des lacrymos ou des banques qui crament. Encore une nuit. Encore des feux et des pierres, des matraquages et des gaz, une ville qui n’en finit pas de se rencontrer à chaque carrefour, de virer les journalistes, de se trouver dans ces gens qui parlent de l’innommable et de la joie. Les keufs morflent sévère.

C’est la guerre civile du monde qui nous attend.

C’est le dernier soir ; celui où l’on sait qu’on est déjà parti. La nuit de flammes et de fureur, les copains n’en finissent pas de charger, demain l’avion, le contrôle de police à la frontière, le dernier café sous les orangers, la dernière pierre lancée, les derniers doutes, cette ville où l’on laisse plus qu’une part de son âme, l’Acropole est toujours en grève, la ville brûle, Alexis est mort et les amis sont là.

Il est si juste que la ville qui a inventé la démocratie en soit aussi le tombeau.

Et puis ces derniers mots, écrits quelque part dans la nuit brûlante.

« Paris sous les bombes,
Athènes sous nos feux. »




à Cool, parti trois semaines trop tôt…

décembre 2008











Toutes les pierres arrachées des trottoirs et jetées sur les boucliers des flics ou sur les vitrines des temples de la marchandise ; toutes les bouteilles enflammées gravitant sous le firmament ; toutes les barricades érigées dans les avenues, séparant nos espaces des leurs ; tous les containers plein des déchets d'une société consumériste que les flammes de l'émeute transforment, d'un rien en un quelque chose ; tous les poings dressés à la lune ; ce sont les armes qui donnent un corps et un vrai pouvoir, non seulement à la résistance, mais aussi à la liberté. C'est ce sentiment de liberté qui, seul, mérite qu'on parie sur de tels moments : le sentiment des matins oubliés de notre enfance, lorsque tout peut arriver, parce que c'est nous, comme être humains créatifs, qui nous sommes réveillés, et non les futures machines-hommes productives du subordonné, du stagiaire, du travailleur aliéné, du propriétaire privé, du père de famille. C'est le sentiment de se confronter aux ennemis de la liberté - de ne plus les craindre.

Ainsi, celui qui veut continuer à penser à ses propres affaires, comme si rien ne se passait, comme si rien ne s'était jamais passé, a de sérieuses raisons de s'inquiéter. Le spectre de la liberté vient toujours le couteau entre les dents, avec l'envie violente de rompre toutes les chaînes qui réduisent sa vie à une misérable répétition, permettant aux rapports sociaux dominants de se reproduire. Depuis samedi 6 décembre, aucune ville dans ce pays ne fonctionne normalement : pas de thérapie par l'achat, pas de routes dégagées pour rejoindre nos lieux de travail, pas de nouvelles des prochaines initiatives du gouvernement pour le rétablissement, pas de va-et-vient insouciant entre des émissions de télé sur la façon de vivre, pas de conduites nocturnes autour de Syntagma, et ainsi de suite. Ces nuits et ces jours n'appartiennent pas aux boutiquiers, aux commentateurs télé, aux ministres et aux flics. Ces nuits et ces jours appartiennent à Alexis !

En tant que surréalistes, nous sommes sortis dans les rues dès le premier moment, ensemble, avec des milliers de rebelles et d'autres gens exprimant leur solidarité, parce que le surréalisme est né du souffle de la rue et n'a pas l'intention de le lâcher. Après cette résistance massive aux assassins d'État, le souffle de la rue est encore plus chaud, encore plus accueillant et encore plus créatif. Proposer une direction à ce mouvement ne nous correspond pas. Toutefois, nous assumons toute la responsabilité de la lutte commune, parce que c'est une lutte pour la liberté. Sans être obligés d'approuver chaque expression d'un mouvement aussi massif, sans être partisans de la colère aveugle ou de la violence pour elle-même, nous considérons que l'existence de ce phénomène est juste.

Ne laissons pas ce souffle flamboyant de poésie s'éteindre ou mourir !
Convertissons le en une certaine utopie : la transformation du monde et de la vie !
Pas de paix avec les flics et leurs patrons !
Tout le monde dans la rue !
Qui ne peut comprendre la rage se taise !

Groupe surréaliste d'Athènes, décembre 2008





Band of holy joy - Fishwives


(petite actualisation avec des tofs gracieusement filées -c'est bien une banque qui crame sur la deuxième-, le texte des surréalistes athénien-ne-s chopés sur le blog du Serge Q. -see da com's for da references-, et la zique qui fera toujours danser les camardes athénien-ne-s, so do I...)

lundi, décembre 15, 2008

Fureur et Mystère

ΜΠΑΤΣΟΙ
ΓΟΥPΟΥΝΙΑ
ΔΟΛΟΦΟΝΟΙ

De retour de quelques jours à Athènes.

Le texte s'écrit, aussi fièvreusement et décidé que cette ville.

FLICS
COCHONS
ASSASSINS

jeudi, décembre 04, 2008

on leur dira...




Allain Leprest - On leur dira


On leur dira sur le fil du silence et de la dernière boutanche.

Sur un poumon, après le cancer et le prochain dernier verre, sur les ruines du grand Jacques, on leur dira à tou-te-s, à ceux-elles déjà venu-e-s te voir et ceux-elles pas encore, au Séb, au Dadu, à la Véro et au Dju, à peine besoin de murmurer aux autres.

On leur dira les arcs-en-cieux, les carnavaux, et la plus belle chanson du monde, on leur dira, celle qui semble venir des Marquises, les chants désespérés sont les chants les plus beaux, on leur dira.

On leur dira que tout se tient, sur deux notes de piano, une rime facile, ta voix d’outre qui tombe, on leur dira que le silence, le prochain dernier verre pour la route, que des mots savent encore éblouir le monde, des mots de pluie et de novembre, des mots qu’on lèche comme confiture sur les doigts, que le grand Jacques dort aux Marquises, que les feuilles mortes se ramassent à la pelle et que nous chanterons le temps des cerises.

On leur dira, doucement, les nuits où nous ne fûmes que trois, toi, la boutanche et moi, le concert où il pleut sur la mer et où Bilou boit dans des verres en pyrex, la bouteille se vide, le chat dort près du radiateur et s’en fout, le verre se remplit, le dernier pour la route.

On leur dira toute la tendresse du monde, toutes les aurores de Delphes et les aubes de Nanterre, toutes les boutanches enfin finies et celles qui restent à vider, toutes celles qui restent à aimer.

dimanche, novembre 30, 2008

les silences de Lacan





Ce sont les traces d’un texte qui ne sera jamais fini.

Jamais écrit, donc.

Plus d’une semaine plus tard, et les blessures sont toujours aussi vives.


« Nul de nous n’est sûr d’échapper à la prison. Aujourd’hui moins que jamais. Sur notre vie de tous les jours le quadrillage policier se resserre : dans la rue et sur les routes ; autour des étrangers et des jeunes ; le délit d’opinion est réapparu ; les mesures antidrogues multiplient l’arbitraire. Nous sommes sous le signe de la garde à vue. On nous dit que la justice est débordée. Nous le voyons bien. Mais si c’était la police qui l’avait débordée ? On nous dit que les prisons sont surpeuplées. Mais si c’était la population qui était suremprisonnée ? Peu d’informations se publient sur les prisons : c’est une des régions cachées de notre système social, une des cases noires de notre vie. Nous avons le droit de savoir, nous voulons savoir. »

Michel FOUCAULT, 1969,
(cité par Jean-Marc ROUILLAN dans ses Chroniques carcérales)




Lacan parle.

Il se tait, aussi. Surtout.

Racle sa gorge, mâchouille un peu son cigare.

Lacan se tait.

Deux jours à la Maison d’Arrêt de Nanterre. Se taire.

Se taire et hurler.

Taire le quartier disciplinaire, le mitard du quatrième étage, les murs fracassés, troués, sanglants, le maton ou l’infirmier ganté d’un plastique maculé de merde, au quatrième étage des cercles de Dante, le cliquetis des portes qui s’ouvrent et surtout se referment, et les cris des détenus peinent à frayer l’air du quatrième.

Lacan parle.

« De sa condition de sujet, on est toujours responsable. »

Responsable, ce môme de vingt berges ; il a choisi le deal, il assume la taule, il a choisi de me voir toutes les deux semaines pour quand même imaginer que le futur ne ressemblera pas toujours au quatrième étage.

Lacan pose.

Sûr de lui, aussi justement infatué de son savoir qu’un maton de sa trique.

Les matons, justement.

« De sa condition de sujet… »

Le samedi exceptionnellement, pour aller au parloir, comme d’habitude. Le-maton-qu-est-sympa (ie : celui qui précède toujours le nom du détenu par Monsieur) me dit que ce ne sera pas possible aujourd’hui parce que Monsieur est au quartier disciplinaire. Seuls les avocats, pas les éducateurs.

« Effectivement, Monsieur, je comprends bien ; seulement j’ai une autorisation de parloir avocat et je suis donc considéré comme tel… »

Je remarque opportunément le nom du lieutenant de permanence du week-end sur une affiche et, après cinq minutes de discussion stérile, demande à parler au supérieur de faction. Trop heureux de se décharger d’une quelconque responsabilité, le maton s’exécute (au sens figuré, hélas).

« … on est toujours responsable. »

C’est qu’il a l’air joyeux de bosser le week-end le lieutenant. Je lui ressors le même discours.

« …
- Non, pas possible.
- Très bien Monsieur, dans ce cas j’exige un courrier de notification expliquant les raisons motivées de votre refus, courrier que vous voudrez bien signer, ainsi que faire signer à la personne m’ayant délivré le permis de visite, à savoir Monsieur le Directeur. »

Je me cale dès lors dans la posture du gars qui attend que l’Administration Pénitentiaire lui remette un courrier un samedi matin de novembre.




Je ne sais toujours pas par quel bout prendre cette histoire. L’horreur de l’escalier menant au quatrième, la cravate de Lacan qui fait obstacle, ma propre peur.

Lacan parle.

Il se tait, aussi. Surtout.

Moi aussi.





et Léo emmerde le mitard et le Vauban !!!!

mercredi, novembre 19, 2008

je vous demande de nous arrêter !!! je vous demande de nous (faire) taire !!!



Nous aussi, nous avons manifesté dans notre vie. Nous avons même manifesté contre la guerre et pour la paix dans le monde. Certains d’entre nous ont même manifesté à l’étranger, et certains aux Etats-Unis.


Nous aussi, nous habitons ou aimerions habiter un village de 300 habitants. Nous avons même imaginé vivre et habiter à la campagne et devenir épiciers. Certains d’entre nous aimeraient reprendre une vieille ferme et planter des carottes.


Nous aussi avons des ordinateurs portables et des connexions Internets. Nous avons même créé des blogs politiques et associatifs. Certains d’entre nous connaissent même des sites libertaires ou anarchistes.


Nous aussi, nous possédons une carte des chemins de fer et destinations de la SNCF. Nous avons, pour les plus jeunes, une carte 12-25 ans pour voyager moins cher. Certains d’entre nous ont même été importunés par les voies ferrés dans leur promenade du dimanche.


Nous aussi, nous avons des livres à la maison. Nous avons même des livres politiques qui expliquent comment renverser le système capitaliste. Certains d’entre nous ont même écrit des livres subversifs expliquant comment organiser une action militante.


Nous aussi, nous aimons la nature. Nous avons même toutes et tous pensé faire de l’escalade pour profiter des paysages de montagne. Certains d’entre nous ont même, dangereux qu’ils sont, des mousquetons et un casque d’escalade.


Nous aussi, nous sommes allés à l’école. Nous avons même essayé de faire des études, voire beaucoup d’études. Certains d’entre nous ont même obtenus leur diplôme BAC+5.


Nous sommes toutes et tous des terroristes de l’ultra-gauche : Arrêtez-nous !













(et merci à olympedeuxgrouges pour son texte)

samedi, novembre 08, 2008

Pendant ce temps-là, d'autres négros en chient grave...







Et ça fait du bien de (re)lire quelques mots salvateurs...



"Comment expliquez-vous l'Obamania ?

Par le fait que Bush était devenu un objet phobique. Déjà, après le diabolique Nixon du Watergate, l'Amérique s'était donnée à un enfant de choeur qui cultivait des cacahuètes, Jimmy Carter. Bush, lui, a fait bien pire que Nixon, il s'est campé avec délice dans le rôle de "l'ennemi du genre humain" : refus du protocole de Kyoto, mépris pour les institutions internationales, politique de guerre préventive, droit de torturer, culte de la force, chauvinisme, etc. Cheney, son vice-président, était surnommé "Darth Vader". Le duo avait réussi à faire des USA le nouvel "Empire du Mal". Obama, c'est pour les Américains la rédemption. La bonté à l'affiche. Écoute, consensus, respect de l'autre, des différences, des pauvres, des faibles, "tout le monde il est beau il est gentil".

Oui, mais la fascination pour Obama va au-delà des Etats-Unis, c'est un phénomène planétaire.

Parce que les Etats-Unis restent la seule puissance planétaire. La Bushophobie était mondiale, elle s'est logiquement inversée en Obamania universelle. Obama, c'est l'homme-miroir de l'Univers, "l'homme-microcosme" comme on disait à la Renaissance, celui qui représente le monde dans sa diversité, qui réconcilie en sa personne et les races et les sexes : il est Africain, il est Américain, il est noir, il est blanc, il est homme, mais en même temps très mode, très mannequin, féminin, fluet, fluide, mignon à croquer, le contraire d'un McCain, handicapé, confus, couturé, tête brûlée, gueule cassée, affichant une virilité agressive qui était tout simplement périmée. Métis et hermaphrodite, qui dit mieux ?

Avec l'Obamania, on n'est plus dans la rubrique politique : on parle d' "espérance", on évoque des "miracles", on compare son "Yes we can" au "N'ayez pas peur" de Jean-Paul II.

Obama a en effet savamment cultivé une image de sauveur et rédempteur du monde, qu'il a promis - tenez-vous bien - de "guérir" et de "changer". Son génie a été de ne pas reculer devant la loufoquerie, et de puiser sans honte ni hésitation dans le stock des plus vieux mythes, des plus anciennes croyances de l'humanité. Et ça marche, même à l'âge de la science, même quand on croit ne plus y croire. Dans le même temps, sa campagne usait avec maestria des technologies les plus récentes. Il a joué sciemment au Messie, tout en modernisant le rôle à l'aide d'une rhétorique toute hollywoodienne : il parle comme un film.

Obama est actuellement l'homme le plus aimé de la planète. Mais on dit déjà que la déception est inévitable, et sera à la mesure de cet amour.

Ça, c'est de la politique à l'eau de rose. Obama a fait carrière à Chicago, où les fleurs bleues ne font pas de vieux os. Tout indique que lui au moins ne se prend pas pour Obama. Sa première recrue ? son pote, autre Chicagoen, Rahm Emanuel, qui sera son véritable numéro 2 : un sicaire hyper-efficace, qui ne fait pas de quartier. Il s'activera en coulisse pendant que, sur la scène, notre Saint Jean Bouche d'or nous chantera des berceuses."


Jacques Alain MILLER, 2008.

(le gendre de Lacan, toussa...)






"Un parti politique est une machine à fabriquer de la passion collective.

Un parti politique est une organisation construite de manière à exercer une pression collective sur la pensée de chacun des membres.

La première fin et, en dernière analyse, l'unique fin de tout parti politique est sa propre croissance, et cela sans aucune limite.

Par ce triple caractère, tout parti est totalitaire en germe et en aspiration. S'il ne l'est pas en fait, c'est seulement parce que ceux qui l'entourent ne le sont pas moins que lui.

Ces trois caractères sont des vérités de fait évidentes à quiconque s'est approché de la vie des partis.

Le troisième est un cas particulier d'un phénomène qui se produit partout où le collectif domine les êtres pensants. C'est le retournement de la relation entre fin et moyen. Partout, sans exception, toutes les choses généralement considérées comme des fins sont par nature, par définition, par essence et de la manière la plus évidente uniquement des moyens. On pourrait en citer autant d'exemples qu'on voudrait dans tous les domaines. Argent, pouvoir, Etat, grandeur nationale, production économique, diplômes universitaires ; et beaucoup d'autres.

Le bien seul est une fin. Tout ce qui appartient au domaine des faits est de l'ordre des moyens."


Simone WEIL, vers 1940
Notes sur la suppression générale des partis politiques.

(la vraie Weil, hein, pas la Veil....)





A mardi, donc, vers Vincennes...





C'est quand même, au bas mot, aut' chose qu'un discours d'Obama...

Et une autre de l'alsaco, puisque ça a eu l'air de plaire...
Abd al Malik, C'est du lourd !

jeudi, novembre 06, 2008

Danse, bordel !!! (m'en fous, chuis lorrain -ou presque...-)









Et même si j'aime vraiment pas les z'alsacos, la chanson qui tourne en boucle en ce moment à donf' en mode repeat...

Et que ça rappelle quelques textes-hommages et de bien vieilles photos, et la vie tout ça, bordel de merde ; et danse bordel !!!



"C'est bête, c'est triste, lorsqu'on ne danse...
Plus...."





"Au fond d’une ruelle pas si évidente à trouver, nous approchons finalement le musée historique. Dur de mettre la main et le pied dessus, parce que les ruines romaines font tellement partie de la vie quotidienne ici, de la récupération architecturale que le moindre immeuble pourrait être un musée.

Le musée historique est tout ce que l’on attend d’une association d’érudits de la fin du XIXème siècle, dans un roman réaliste. Sauf que nous sommes au début du XXIème. Une femme d’âge mur lève les yeux, sertis de lunettes, vers nous. Elle parle français avec peine, mais semble prendre un grand plaisir à l’exercer. On sent en elle l’une de ces mécaniques rouillées qui grincent et geignent, mais avec d’autant plus de bonheur que la rouille chute et disparaît par ce mouvement. Heureuse aussi de voir des gens.

Le musée n’est pas chauffé. Il est assez grand, bien tenu, avec des tas de documents, plans comparatifs, photographies anciennes, indices cartographiques et humains et même géologiques qui satisfont ma névrose de maîtrise et de compréhension de mon environnement. La muséographie, comme on pérore dans notre pays avec prétention est un peu chaotique par moments, la chronologie respectée avec beaucoup d’entorses, qui ne sont pas compensées par une ordonnance thématique. Déstabilisant, mais heureux. On finit par se laisser transporter, passés les premiers croquis, par ce grand déambulatoire entre les chapelles historiques de la ville, on erre avec bonheur dans ce musée glacial, vide de tout visiteur, silencieux, mais craquant de partout.

En bas, nous retrouvons, en sortant, la femme d’âge mûr. Nous parlons un peu. « Nous aimons parler français, nous les érudits croates ou slaves. C’est important. C’est la faute de Voltaire et Rousseau… ».

Un homme est là. Il s’anime. Cheveux blancs, veste côtelée, marron, au velours élimé, déjà brillant. Dégarni, une belle couronne de cheveux blancs. Il s’anime et déclame plus qu’il ne parle. Un véritable dinosaure plaisant, universitaire à la retraite ou au placard ?

Non, ancien croupier à Las Vegas. Son français est hésitant mais théâtral et grandiloquent, et le voilà parti à nous narrer avec ferveur sa ville, Split, ses anecdotes, ses travers, ses drôleries et l’occupation de ces « connards de fascistes italiens qui n’ont même pas été foutu d’empêcher les soldats de saccager les ruines romaines ! ».

Ses vingt ans, il les a passés à Paris. A l’époque. A l’époque, nous disait-il, on dansait. On dansait partout à Paris, tous les soirs, dans la rue. Apprenant qu’Olivier et Marianne sont Parisiens, il leur jette, avec son accent slave grandiose : « on danse encore dans les rues de Paris ? ».

Comme ça. Olivier ne sait que dire. Marianne se tient coite.

« Parce que, enchaîne-t-il après un silence, hochant négativement la tête, de sa voix qui roule par boyaux et appendices pulmonaires, parce que, c’est ça qui manque aujourd’hui au monde. C’est des gens qui dansent. Regardez-nous, en Yougoslavie : on dansé ensemble si longtemps, ça a été la guerre parce que l’on a cessé de danser. C’est ça qui manque au monde. Dansez, sinon c’est la guerre. La guerre ou la danse, il n’y a pas d’autres choix. Ou on danse ou on crève, parce que la danse, c’est la poésie, et le monde, il lui faut une révolution qui danse et fait de la poésie sinon nous sommes tous morts. Allez danser dans les rues de Paris, ne faites pas attention à ce que disent les ignorants, dansez ! »

Au milieu des ruines romaines. Au milieu de Split. Il nous a dit ça."




Abd al Malik - Conte alsacien ; une pure merveille de danse et d'amour et de vie en masse, bordel de merde !!!





(et encore et éternellement merci au Dadu pour son merveilleux texte)

samedi, novembre 01, 2008

"C'est tout de même un peu incongru..."

Fin de soirée dans le métropolitain. C'était pas trop la night fever, night fever. Le changement à Bastille pour choper la une nous a mis au milieu d'une horde furieuse de honteux hommes verts. Hantise. On marche au milieu de six FAMAS (1) fièrement pointés vers le sol. Wilkommen in Frank(IIIème)Reich.

On catégorise à fond, en fait, ce soir. Avant on s'était tapés les Indo-Srilankais de La Chapelle et les bobos théâtreux venus voir Joël Pommerat aux Bouffes du nord (2). Avant, on avait vaguement cherché un fête sauvage trop hype dans le métro où devaient se presser les rédacs de Technikart et des Inrocks, mais qu'il y a eu trop de monde et donc que ça a été complètement foiré pour raisons de sécurité.

On va pour se rentrer, donc, et les militaires. Qui doivent rentrer à Vincennes, sans doute, après une dure journée à parader dans une quelconque gare. Six crânes rasés, si jeunes, oeil encore en service, sourcils fiers et inquisiteurs, le doux cliquetis des rangers dans les couloirs du métro.

Ligne 1, vendredi soir, 23 h30, de la mixité sociale en masse. Du jeune bobo qui va en teuf avec son méga pote tu vois quoiiiii, du vieux bourge en Loden vert qui rentre retrouver sa cheminée, son fauteuil Voltaire et sa grosse qu'il vient de consciencieusement cocufier sur les grands boulevards une demi-heure auparavant, du vieux punk de collec tout bourré que même à Hambourg il ferait peur aux dockers (3), du gaillard de banlieue de la Wesh-Coast, de l'élite de la France combattante qui s'est engagée et qu'a pas encore eu l'honneur de périr pour le drapeau dans une embuscade afghane, et nous, donc, aussi.

Et la scène. La photo à prendre. Les bobos tu vois quoiiiii se retournent et sourient, nous cherchent du regard, on mate et effectivement, oui, c'est trop la classe. D'autres gens, aussi. Un début de joie complice et bienveillante. 

Je sors l'appareil, m'approche. Le keupon est trop bourré et le militaire trop dans son rôle. One shot.

Retour sur la banquette. Montre la photo aux deux tu vois quoiiiiiii. Qui se marrent. Le Loden vert dit le plus sincèrement du monde à la cantonade que "C'est ça la démocratie". Un temps. Il se marre, puis nous regarde : "C'est vrai que c'est tout de même un peu incongru".

Tu m'étonnes, John.

Moment de partage à la con et essentiel entre des personnes qu'avaient rien à voir. Le punk descend à Nation, il a le pantalon de treillis aussi vert et camouflé que les autres mitrailleurs ; les tu vois quoiiiii et le Loden prennent la porte avant leur correspondance. On se salue, grands gestes de la main, ben ouais, a few minutes de bonheur un soir de Toussaint, et pas pensé à leur demander leurs mails pour leur envoyer la photo.

Le Loden vert doit retrouver sa grosse alors que nous finissons notre bière srilankaise au dessus du périph'. Il doit avoir le même oeil rieur que nous, il doit lui dire que parfois, malgré tout, c'est beau la France, elle ne comprend pas très bien, il repense au punk, aux gens du métro, à nous. Il replonge dans sa lecture du Figaro. Il rit.




























Du coup, le fantastique "Nous" des glorieux Ludwig von 88 est tout à faitement adéquat !




(1) : Oui, je t'ai déjà dit la signification de l'acronyme, Fusil d'Assaut de la Manufacture d'Armes de Saint-étienne. Tu peux briller maintenant au milieu de ton dîner à thème Vigipirate.

(2) : Je tremble (1 & 2), texte et mise en scène dudit monsieur. Si tu veux voir ce qui fait frémir le Tout-Paris en matière d'incompréhensible kitcherie qui se la joue post-moderne, vazy, fonce...

(3) : Qui pissent et qui pleurent sur les femmes z'infidèles toussa...

samedi, octobre 25, 2008

V.I.P. (Very Important Pompidou)



Puisque je sais que y a du fan lourd du marron côtelé, de l'aficionado du comptoir en formica, de l'inconditionnel de l'ORTF-voix-de-la-France-qui-cause-dans-le-poste, puisqu'il "faut être absolument moderne" et que justement, Georges veille et te la souhaite bonne (1)...









Et du très furieux disco 70's avec I love to love de Tina Charles






(1) : La zolie z'image vient évidemment des chez les tordu-e-s de La Chaux de Fonds que sont Plonk et Replonk

lundi, octobre 20, 2008

un ouikend au festoche

Il était là...





(Un peu la flemme pour écrire les z'aminches, vous devrez vous contenter des tofs et de la zique, voilà.)



Pigalle. Set un peu froid, et même si tous les tubes y passent, même si un bon gros son, pas tant d'émotion que ça de la part du Hadji qu'a quand même pris un sacré coup de vieux. Mais bon, Pigalle quoi...





Un p'ti paradis aux portes de Pariiiiiiiiiiiis...



Bonne claque avec la Agnès Bihl, drôle, finement intelligente et classieuse.

le Copain de mon père, la la...



Et puis le Leprest. Simplement merveilleux, la grâce et le vertige, sur un fil de silence. Merci Allain.



Bilou



Et puis, ben à la fin, j'ai fait mon fan lambda, et le Allain il est vraiment super chouette comme gars...

samedi, octobre 18, 2008

dans le brouillard de l'ombre




N'en déplaise au Dadu...





Qui n'a jamais été baptisé au champagne dans la cathédrale de Reims.

Qui n'a jamais entendu la Passion selon Matthieu dans la cathédrale de Reims.

Qui n'a jamais vu l'aube rosir un matin de février sur l'abside de la cathédrale de Reims.

Qui n'a jamais célébré Saint Remi et pas Rémi.

Qui n'a jamais, un soir d'hiver, entendu l'organiste répéter la grande Toccata dans ce même lieu.

Qui n'y a jamais vu une messe de Noël.

Qui n'a pas pleuré à la coupe du saule pleureur dans les jardins attenants et cherché l'éléphant sculpté qu'on voyait depuis ce saule.

Qui n'a pas vu une Algérienne y brûler un cierge et être triste comme un saule.

Qui ne s'est jamais réjoui de voir l'antique commissariat être transformé en médiathèque sur le parvis.

Qui n'a pas chez lui de cette fabuleuse pierre de Courcelles.

Qui n'a jamais entendu les vieilles et vieux du coin raconter la tragédie de 1914, les vitraux planqués dans les caves de Champagne, l'incendie terrible et le gel de 1917.

Qui n'a jamais lu le baptême de Clovis par Pascal Quignard dans ses Petits Traités.

Qui n'a pas vu la brume draper les tours et noyer la flèche.

Adora quod incendisti. Incende quod adorasti.









encore définitivement une des plus belles chansons au monde, les immenses (rien que ça) : Ella Fitzgerald et Louis Armstrong, Stars fell on Albama

jeudi, octobre 16, 2008

Sifflons la Marseillaise tant qu'on chantera pas l'Internationale (ou Seine-Saint-Denis style ou le Temps des cerises -m'en fous, chuis pas sectaire-)




"La banlieue est-elle maudite ?"

On rigole pas sur France-un-faux au matin. C'est le titre du débat avec l'inénarrable Xavier Lemoine, maire de Montfermeil (1). Autant dire que l'analyse socioligico-politique des "sifflets de la Marseillaise" vole haut.

Ce soir à Nanterre (pas mes rêves !), alors qu'un capuche-casquette me confie qu'il va aller voir le dernier Woody Allen pour Scarlett Johansson et Penelope Cruz et qu'on commence à peine à débattre, le A. débarque.

"Alors, Ubi, t'en penses quoi des sifflets sur la Marseillaise ?

- Oh, tu sais, à partir du moment où Lââm elle chante, j'crois que ça peut être que justifié...

- Wesh, vazy, t'abuses, elle a voulu faire les choses bien, elle a mis une casquette et une capuche, faut pas lui en vouloir...

- ...

- Bon, sérieusement, t'en penses quoi ?

- Bah, tu sais, moi, la Marseillaise... Non, sinon, c' qu'est con, c'est qu'ils pètent tous les plombs depuis deux jours.

- Tu sais, Ubi, j'étais au match. Sous la tribune des Tunisiens. Remarque c'était pas dur d'être sous la tribune des Toun's vu que y avait que ça. A côté de moi, y avait dix gars de Saint-Denis. On s'est bien fendus la gueule et on n'arrêtait pas de vanner les Toun's. On leur gueulait des 'Zizou, Zizou' depuis le début du match jusqu'à ce qu'ils marquent. Quand on a marqué, on a hurlé 'allez les Bleus !' pendant une demi-heure et toute la mi-temps, on a cru qu'ils allaient nous égorger comme des moutons le jour de l'Aïd. Mais on a tenu bon. et on s'est vraiment bien marrés avec les gars de Saint-Denis... Mais le pire c'était le lendemain matin...

- Comment ça ?

- T'as entendu c' qu'il a dit Bayrou ?

- Vite fait...

- Tu sais, Ubi, je regarde tous les jours Télématin avec William Leymergie parce que ma mère elle aime bien et ça lui fait plaisir que je sois avec elle. Là, pour la première fois depuis trois semaines, Leymergie il a pas ouvert le journal sur la crise mais sur les sifflets des arabes. Et pour la première fois depuis trois semaines, ma mère elle a arrêté de cracher sur sa pauvreté mais elle s'est souvenue qu'elle était arabe. Il a capté Bayrou, c'est du bluff pour faire croire que...

- ...

- Tu sais, en fait, ceux qu'ont sifflé, c'était des gosses des MJC du 93 qu'ont des places gratos pour remplir le stade contre des équipes de merde. Parce que la télé elle aime pas trop les sièges vides, alors avant le match contre les pays minables, elle file des places gratos à tout le monde. Et les mômes ils sifflent n'importe quoi. Et c'est pas la Marseillaise qu'ils sifflent, c'est Sarko. Tu sais, Ubi, chuis français, je vote à toutes les élections même celles où je comprends rien, chuis aussi français que toi..

- Yep yep, je sais, A., pas besoin de me le dire...

- Nan mais si, c'est important, quoi. 'Fin voilà quoi, surtout encore plus avec l'autre con de chauve qu'était dans le rugby avant : 'Refuser de faire jouer l'équipe de France contre les pays du Maghreb, ou alors seulement en province'. Franchement ça veut dire quoi ? Il nous prend pour qui ce connard ???

- 'Clair que c'est un fils de pute (oui, je sais, l'éducateur outre passe sa fonction dans cette réplique éternelle)

- Sérieux Ubi, tu sais c'qui va se passer, s'ils arrêtent les matches juste parce qu'on siffle la Marseillaise, la prochaine fois que je vais au stade, je siffle juste pour voir ce qui va se passer et si l'autre con de Sarko il aura les couilles de faire ce qu'il a dit. Et là, on va rigoler. Je l'ai jamais fait, mais faut pas non plus qu'on se foute de ma gueule.

- (éclat de rire intersidéral)

- Parce que tu sais ce qu'ils vont nous faire d'ici deux semaines si la crise continue ? Ils vont sortir en skrèd deux-trois pitbulls de la SPA de Gennevilliers, ils vont te les foutre à la sortie d'une école, y en a un qui va mordre, et ça va te faire trois jours de Une dans les journaux. Et même qu'avec un peu de bol, quelqu'un aura vu qu'un arabe tenait le pit' en laisse..."

"La banlieue est-elle maudite ?"

Ouais, grave, et surtout, elle t'emmerde.










Et on s'arsouille et on boulègue avec l'hymne footeux des Fabulous Troubadours, de Toulouse !






(1) : Pour mémoire, la première partie de ce mythique doc de la bande à Kourtrajmé vers 2005-2006 où le Xavier se signale par sa lucidité et son ouverture...

mardi, octobre 14, 2008

nach Berlin, fuck Berlin ! (vol. VII)

Last days, last nights.

Refaire une dernière fois la bouffe pour le même résultat, sauf que la punkette qui jette sur le canap' une côtelette saignante pour son clébard, sauf que ceux qui viennent dire "trop d'oeufs" alors qu'on prépare une omelette pour 35 personnes, sauf que la soupe à l'oignons et la craie sur l'ardoise pour marquer le menu du soir, et toujours pour les vegans, et toujours les bougies et les serviettes.



Le mix de la soirée est prêt. Fin chauds pour danser, certain-e-s se sont barré-es à d'autres occupations, je tiens la chaîne et le mp3. Ca se succède à donf' et à gogo de tous les méga-tubes de l'international que si tu danses pas c'est que t'es soit paralytique soit abruti. A peine si ça se trémousse sur Depeche Mode. A peine si un gars hoche la tête au son de Billie Jean. Du coup, je vanne à fond en balançant Antifa Hooligans (come on, come on !!!) et Schnappi. Pas plus de réaction.

Une dernière Sterni pour l'illusion.

-------------------

Dernier jour et les adieux avec nos z'hôtes.

Ca se languit avec le N. et la C., tournée de bières, les mots qui semblent dégueuler de nos bouches, même si Berlin et toussa, cette joie de passer trois semaines ensemble, cette joie de pouvoir se voir à chaque instant, cette joie du débat et du partage. Maudits Français. Sacrés amis. Hasta pronto, companer@s.

Même pas envie de saluer les gens du squatt. Trois semaines de "vie commune", pas grand chose de partagé, la larme à l'oeil en quittant le C. et même pas envie de saluer ce sketch. La libération de la fin. La joie de la gare et du train de nuit. Demain, Paris. On s'ouvre une boutanche de blanc pour fêter ça.

Une nuit merveilleuse dans le train où on a plus tchatché en neuf heures avec des gens qu'en trois semaines allemandes...

Big up à Robert, le facteur de près de Gap, un vrai beau gars de cinquante berges attaché au service public dur comme le fer de son vélo jaune, à Tymo, le géorgien rigolo de Tbilissi qui a peur de trop aimer Paris et de pas vouloir rentrer à Berlin, à la Pauline qui désespère dans sa cantine allemande, au suédois engoncé dans son sourire timide et solitaire, au camarade nantais qui croyait que Berlin...

On a vidé le stock de blanc du wagon bar avec une furie qui n'excluait pas une certaine méthode.

On a causé en veux-tu en voilà jusqu'à pas d'heure en déjouant les pièges du sombre-cerbère-ausweiss-schnell-raus qui nous aurait pendu sur une odeur de clope.

C'était beau, les amis du train.

On a retrouvé la douceur du matin à Paris, feuilles mortes, café, et le serveur en tablier blanc qui te balance sa vanne comme si de rien n'était, le métro puis la rue d'Avron qui se réveille peu à peu, la rue d'Avron qui reste à tout jamais la plus belle rue de Paris, puis la rue de Paris à Montreuil (qui elle, n'est pas la plus belle rue d'Avron -humpffff, désolé...-).




(Thib', elle est pour toi, celle-là !)



(ouh ouh ouh, stayin' alive...)



(pas mieux)












Mais les enfants ce sont les mêmes... Barbara chante Gottingen, en allemand, bitte !






("les enfants, ça sert à rien, faut les brûler, comme au Brésil" : merci au Thib' pour cette tof au Flohmarkt de Prenzlauerberg -et les Roumains aussi-)

samedi, octobre 11, 2008

nach Berlin, fuck Berlin, nach Hamburg ! (vol. II)



A quelques kilomètres du port, après la sur-friquée Blankenese, y a Wedel et son Wilkomm Höft.

Un ponton, juste un ponton, le ciel gris et la pluie qui ne va pas tarder, quelques Astra dans le sac, rien qu'un ponton et la lumière sur l'Elbe.

La bruine, le vent, les mouettes.

On attend le chaland.

Qui arrive, au loin. Les hauts-parleurs crachent un jingle nasillard. Quelques mots en allemand. "Wilkommen in Hamburg".Puis l'hymne du pays d'où le bateau est affrété. Et le jingle.

Un endroit attachant et dérisoire.

Quelques vieilles répondent en soulevant leurs parapluies aux coups de cornes des bateaux qui quittent le port. Attendre le prochain bateau, pour voir. Rêver du prochain départ pour Southampton, Le Havre, New York, ou le cabotinage jusqu'à Anvers.

Un lieu en sépia. A dix mille bornes de ce que ce monde de timbrés propose, une sirène rouillée et des gens sur le pont qui saluent ceux qui regardent passer les bateaux sous la pluie.

Rester trois heures, sous la flotte et le vent, se dire qu'on va y aller après le prochain container, le dernier voilier. Des qui partent, des qui rentrent.

Et le jingle nasillard.

Et encore du vent.

"Il y a les vivants, les morts, et ceux qui sont en mer" disait Platon.

A Wedel, vouloir tant être en mer.
























Chauffe Marcel, t'as voulu voir et on a vu, pas vrai Jacques ?

jeudi, octobre 09, 2008

nach Berlin, fuck Berlin, nach Hamburg ! (vol. I)

"Un port du nord, ça plaît, surtout quand on n'y est pas..." (1)

C'est pas trop une maison bleue non plus (2)




Go north. Covoiturage avec un blondinet crâne rasé dans une Audi flambant neuve. L'avantage de la bagnole partagée, c'est que t'es un peu obligé de causer. Au moins au début. Le gars, t-shirt kaki et drapeaux allemands sur l'épaule, nous demande d'où qu'on vient. "De la banlieue de Paris", qu'on lui répond dans la langue de Nietzsche, bikoz' qu'on maîtrise pas trop la langue de Goethe. "Ah, là où les voitures brûlent" qu'il nous répond péremptoire. Du coup, bonnes pâtes qu'on est et pour relancer la conversation qui s'était soudainement arrêté là, on lui demande si y a des banlieues à Berlin (3). Et là, ze réponse qui classe son homme : "Oui, évidemment : Kreuzberg. Que des Turcs. Intégration zéro." Ouch. Je souhaite juste au gaillard d'arriver à Paris par la gare du Nord. Passkeuh si X-berg c'est la zone et l'intégration zéro, le dixième c'est la lie de l'humanité -qui parle même pas français ni allemand, en plus- (4). Et j'te parle même pas de Montreuil ni de Nanterre (pas mes rêves !). Fin du voyage, bizarrement en silence.

Hamburg, faut bien le dire, ça claque chanmé sa mère. Le port du nord dans toute sa splendeur de ciel pluvieux et gris, les docks, le hareng, les hôtels sinistres, les mouettes grasses comme le dégazage du dernier supertanker, la Reeperbahn où les putes n'arpentent pas encore le trottoir, la façade des compagnies d'assurance maltaises ou indonésiennes. Sankt Pauli qui traîne sa sale réputation et les fleurs du côté d'Altona.

seagulls.wallpapers.com vous remercie...


Hamburg, la nuit, c'est beau. L'odeur verdâtre des canaux où j'aimerais bien voir remonter des noyés, les souvenirs d'Ostende et d'Amsterdam qui remontent à défaut des noyés, les putes qui ont pris place, le maquereau qui prend place dans l'assiette et celui sur le trottoir qui veille sa marchandise humaine, les lumières rouges des grues de déchargement au loin parce que faut bien continuer le boulot, l'hôtel miteux dans un quartier qui craint où ça doit jouer du surin plus souvent qu'à son tour, la tête de mort de Sankt Pauli flotte à la fenêtre.






Le métro de nuit tel le chat bus dans Totoro. Les lumières de la ville. Le vent froid et salé qui suinte de l'Elbe. Lumières, lumières, lumières ; et encore du vent...







Et boire à la santé des putes de Hambourg ou d'ailleurs avec le Jacques (quelle chanson, quand même...)


(1) : Léo, of course, en réponse au grand Jacques.

(2) : celui qu'a fait la moitié de sa carrière sur les reprises du Georges.

(3) : alors qu'en fait non y en a pas, on l'a vu et on en a déjà discuté avec des gens.

(4) : "et en plus, c'est dégueulasse, y a de plus en plus d'étrangers dans le monde..." qu'il disait Luis Rego.

mardi, octobre 07, 2008

nach Berlin, fuck Berlin ! (vol. VI)

Aprème à Prenzlauer Berg en passant avant par le vieux cimetière juif. Autant le quartier est aussi bobo que la rue vieille du temple un jeudi soir à 21 heures, autant, à l'instar du mémorial, le cimetière m'émeut au plus haut point. Va ptêt falloir que je me convertisse et me circoncise, moi... Rangées de tombes disjointes que le lierre tente de recouvrir dans une lumière à gerber. Noms effacés, dates de mort périmées depuis longtemps. Seuls dans les allées, la kippa que je dois recouvrir pour l'occase me grattouille la couenne chevelue. Je capte mieux la beauté du mémorial, du coup. Enfin, je crois. Comme si cet endroit était un des seuls havres de douceur et de méditation dans la laideur de cette ville. Le temps qui suit son cours, inéluctable. Le kaddish pour les enfants qui ne seront pas à naître. Et toujours la Ferneseheturm au loin.

(désolé C., la lumière était vraiment à gerber, mais ça en fait une de plus pour ta collec'...)





(je sais pas vous, mais moi, Israel Magnus, comme nom, ça me fait rire...)





(le camarade a eu la lucidité, ou la chance, de pas finir à 200 bornes à l'est de son lieu de naissance, ce qui ne fut toujours pas le cas...)



Prenzlauer Berg et les jolis graffs qui ne suffisent pas à masquer le côté imblairable de l'endroit. "L'endroit pour voir et être vu" que disaient en substance le Berlioz et le Routard. Que récupéré par les alternos suite à la chute du Mur et ensuite colonisé par les artistes un peu moins underground et aujourd'hui totalement récupéré par tout ce que Berlin compte de plus hype. Et la Sterni est à un euro vingt au lieu des cinquante-cinq centimes rituels. Si c'est pas un signe. Mais de jolis graffs et collages. Voilà.

(ach, this fuckin' turm ist everywhere...)


(hi hi...)


(kassdédi au Dadu...)


(kassddédi au Thib' -ça, c'est la méga-classe...-)



On se rentre et vu comment on en a ras-le cul, on a décidé de s'y coller pour la bouffe. Pour trente barbares allemand-e-s et apparenté-e-s.

L'avantage, c'est qu'on n'a pas de pression ; on peut leur faire un truc dégueulasse, sûr qu'ils s'en rendront pas compte et risqueraient même d'en reprendre.

Méthodiques, on ne range qu'une partie de la pièce pour préparer le repas, faut dire qu'ils seraient bien foutus de nous faire un nouveau Tchernobyl juste avant 20 heures. On choisit de taper dans le classique et maîtrisé : curry de poulet mauricien et pêches au vin. Belle table, bougies, toussa...

Ca commence à embaumer dans la cuistance que déjà, deux-trois zigomars posent des questions. Bon signe. Bon des questions basiques du genre : "y en aura assez ?" ou "vous avez prévu pour les vegans ?" mais déjà des questions. Un hippie-punk hurle de rire en voyant des serviettes en papier de couleur au milieu des assiettes. Ca l'inquiète, le bougre. Sûrement qu'il était habitué à s'essuyer dans sa manche ou ses tifs.

Ca bouffe et tchatche un peu plus que d'habitude, cela dit. Certain-e-s ont même presque l'air bien. Les gens se resservent (mais ça, c'est pas signifiant vu qu'ils mangent pour ne plus avoir faim). Et truc inconcevable, ça applaudit à l'arrivée du dessert. C'est quand la première fois de ma vie que je vois qu'on applaudit un repas. Bon, c'est cool, c'est que ça doit leur faire plaisir. D'autant plus que certains se lancent spontanément dans la préparation du café pour l'assistance. Oh oh... Espérons que les relations de demain s'en souviendront...





Le splendide Partizanlied en yiddish pour la peine...