samedi, février 09, 2008

brasier

"Il y a des vérités qui ne peuvent être révélées qu'à la condition d'avoir été découvertes.
Vous avez ouvert l'enveloppe, vous avez brisé le silence"

Wajdi MOUAWAD, Incendies




chère É,


Je n'aurais donc pas la joie de te faire découvrir l'incendiaire de Montréal que me fit découvrir une incendiaire de Montréal.

Si longtemps que nous ne nous sommes vus, que je ne t'ai vue, que nous ne t'avons vue, en fait, l'incendiaire et moi, première épreuve, comment faire comprendre ce qui nous unit à celle que j'aime, les mots de Mouchard après le Sacrifice de Tarkovski et ces vingt dernières minutes de feu, d'arbre sec qu'un gosse arrose, de cendres encore rougeoyantes de notre histoire.

"Adore ce que tu as brûlé, brûle ce que tu as adoré" qu'il disait, le saint Remi au Clovis demandant le baptème.

Pour une fois, ne rien brûler.

Une incendiaire de Montréal illumine ma vie, mes nuits, mon monde.

Burn, baby, burn. Incendies de Mouawad. Le livre que j'aurais aimé lire à Delphes, au matin, quand le soleil qui nait embrasse la montagne, la vallée d'oliviers et le théâtre, les pas dans les pas des petits pieds enflés d'OEdipe, je lisais Sophocle, il m'aurait fallu Mouawad, le monde qui nait à Delphes, à Montréal, à la prison de Kfar Rayat. Tous les matins du monde, dans l'espace sacré du vertige.

L'incendiaire pose ses valises, définitivement j'espère, début mars, à cent mètres de chez toi.

"Brûlé de plus de feux que je n'en allumais" que le Pyrrhus assène à la sourde Andromaque.

Ne pas contrevenir à ce qui reste de nos jolies cendres.

Et si nous n'avons plus de nuits où se parlent nos joies, nos angoisses, nos corps, je suis là, je sais que tu le seras toujours, non plus cet incendiaire phénix qui renaîtra encore, mais cette simple veilleuse qui éclaire et réchauffe et ne s'éteint jamais.



À bientôt, chère belle amie,


Ubi









Barbara - À chaque fois

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