mardi, avril 15, 2008

du général au particulier



Fin de manif lycéenne à Nation.

Grand soleil, sur un monticule devant le carrousel à l'arrêt des bus 56 et 86, trois gisquettes sont assises sur un banc. Le vieux passe. Il marche à deux à l'heure, le journal dépassant du sac, impossible de voir s'il s'agit du Figaro ou de l'Huma. Boutonnière rouge.

La manif plus marquée par la présence des keufs et des SO que par les atterrantes et drolatiques bastons de jeunes de banlieue quand le 9-4 chauffe les bouffons du 7-8 qui enculent les lascars du 9-1 répondant aux provocs des gars du 9-2 se défendant contre les gusses du 9-3. Le 7-7 était excusé pour l'occase.

Des flics partout. En civil, en grande tenue anti-émeute, en civil, dans les SO, en civil aussi. Avec flashball, lacrymos, tazer, caméras, brassards, appareils photos, marqueurs peinture, limite s'ils ont pas sorti les casques à pointe.

Et le vieux qui passe, tout à la fin, alors que le bataillon de civils vient de passer, gazeuses, matraques et brassards oranges en érection, à la recherche, sans doute, du fameux jeune noir à casquette et capuche avec des baskets qui gueulait "enculé" y a une demi heure. Tu sais, celui qu'écoutait du hip-hop.

Les trois gisquettes parlent depuis tout à l'heure, d'on ne sait trop quoi, de mecs sans doute, de cette manif rigolote et funky qui permet de légalement sécher à l'approche du printemps, le vieux s'arrête, regarde, et parle, sentencieux :

"- C'est une honte, vous êtes manipulés !
- ...
- Quatre mois ! Une loi a été votée y a quatre mois et c'est maintenant que vous criez !!! C'est une honte ! Vous êtes manipulés !
- Wesh, m'sieur, c'est la fête, on est dehors, tous ensemble, c'est la vie, quoi...
- Une loi a été votée, c'était avant ou juste après qu'il fallait réagir."

Les trois gisquettes se regardent, air imbrobable, le vieux s'approche, tend le revers de la veste sur lequel la boutonnière rouge est accrochée.

"- Wesh, c'est quoi ça ?
- Commandeur de la légion d'honneur, j'ai répondu à l'appel du général de Gaulle, quand je pense à ce que j'ai fait pour vous...
- ...
- Vous êtes manipulés ! Quatre mois !"

Le vieux s'en va, ignorant les maladroites tentatives de débat que les gosses qui s'attroupent essaient de provoquer. Kess ki raconte, là-çui, wesh z'avez voté Sarko ou bien, c'est quoi ton ruban... Les rires repartent.

Deux "certaines idées de la France" qui se séparent.

Dis, cher vieux, ils étaient combien -à part les marins de l'île de Sein- les ceux qui partirent le 19 juin pour Londres, ils étaient combien les ceux qui étaient au maquis quatre mois plus tard en octobre 40, ils étaient combien à planquer des juifs en 43 même quand les lois étaient votées, ils étaient combien à penser se battre pour des gosses de 2008 alors que la Gestapo et sa grande amie la Milice rôdaient ?

Ils étaients combien, les mythiques "Résistants de la dernière heure" de juin 44 ?

Et toi, cher vieux, riais-tu au coeur de la guerre quand des vieux te parlaient de 14 ?...









La Souris Déglinguée - les Parents à Chantal






(merci au Thib pour la tof
-z'avez vu, on dirait un mini Casse-toi-pauv'-con au milieu...-)

5 commentaires:

Anonyme a dit…

Ouais, t'as raison. Ils étaient pas bezef.
Donc, qui dépassait, c'était pas l'Huma

Anonyme a dit…

Des cartes de 14, j'en ai quelques unes
Mais pas de celles où on disait tout le malheur
Moi, celles que j'ai, c'est plutôt, dis le bonjour à la marie, au père
Mais, on devait pas trop le dire, le malheur
On le gardait pour soi
Le malheur

Anonyme a dit…

Ma parole mais ils tiennent une planche lazurée chêne foncé !

Si tu voyais l'explosion en ce moment sur les chênes marcescents, Ubi !

Jamais je ne ferai de photo. Jamais. Plutôt crever.
Mais je te le dis quand même, rien que pour toi.

ubifaciunt a dit…

@ thé : je le crains aussi (sinon moi j'en ai une de la cathédrale de Reims bombardée comme c'est pas possible, la chiar de poule d'une des villes martyres sans rires)

@ birahima : je crois que c'est plutôt un bout de barrière métallique vert bouteille, au risque de te décevoir/rassurer (sinon, tu racontes pour la marcescence des chênes du moment où qu'on peut voir ça ?)

Anonyme a dit…

effectivement, il y a un indice à l'extrêmité de la barre ;-)

comme je te le disais, les feuilles commencent à tomber au printemps, en un tapis doré au sol ;
poussées à terre progressivement, comme des gouttes de pluie, par des petits bourgeons que tu dirais vraiment sans gêne ; sauf que c'est un vrai rituel , un passage

en ce moment, feuilles qui se déploient , fleurs
à suivre