samedi, août 23, 2008

Tout est perdu, fors l'honneur !



Comme c'est de la légende familiale, permettons-nous d'embellir et de romancer l'histoire d'un de ses aïeuls. Le dialogue est toutefois véridique. S'il ne l'est pas (comment un tel trait de génie ne le saurait-il être ?), qu'il le soit. La phrase finale est issue d'une chanson des camarades de Casse-Pipe. Romançons donc, et commençons.

Il est normand. Il hait les Anglais doublement. D'abord puisque français, surtout puisque normand. Il s'appelle Hippolyte, Jacques ou même Guillaume, de qui nous tenons cette histoire. Il est corsaire, c'est à dire qu'il travaille pour le roi de France, ou l'empereur, ou la naissante république, à écumer les mers, une lettre de marque dans la poche, à faire du butin, à piller légalement. Mettons qu'il s'agisse de la fin du XVIIIème ou du début du XIXème. Et puisqu'il s'agit de mer, d'aventure et de piraterie, nous pouvons forcir le trait, imaginer la barbe et la pipe, le tonneau de calva, nous sombrerons avec plaisir dans les déferlantes et les clichés.

Cherbourg, il pleut avec obstination. Le camarade Guillaume a quarante ans. La dernière course n'a que peu rapporté. Il maugrée. Sans doute ressasse-t-il l'histoire du désastre de la Hougue, bataille perdue de Louis XIV dont les vieux parlent encore. Au loin, la digue de Querqueville commence à se construire. Il pleut. Guillaume entre dans une taverne. Odeurs de mauvais cidre, de tabac et de sueur. Quelques mines patibulaires qui se reconnaissent. Echange de confidences à propos du prochain départ, une frégate anglaise aurait été aperçue au large. On embarque demain, à une vingtaine, pas plus. Il s'agit de réunir l'équipage habituel.

Le lendemain, il pleut toujours. Les traits sont tirés, les paroles rares, les gestes sûrs. Guillaume inspecte une dernière fois sa hache d'abordage. Les poignards. Les grappins. La vigie annonce l'Anglais au loin. Guillaume et ses hommes sourient.

La razzia est en règle. Le commandant du navire de la Perfide Albion ne le sait que trop. Son bateau va couler. Son regard méprisant cherche les yeux farouches du corsaire. Non il ne quittera pas le navire. La honte, la défaite, et la mort. L'Anglais cherche la phrase définitive qui restera dans l'Histoire.

"Monsieur, vous combattez pour l'argent ; nous autres, nous combattons pour l'honneur."

Guillaume daigne le regarder.

"Monsieur l'Anglais, sachez qu'on combat toujours pour ce que l'on n'a pas."

Il pleut toujours en rentrant au port.

Il parait que la mer est un grand cimetière où gît le souvenir de nos amours corsaires.














La pluie tombe aussi chez le grand Daniel Darc...

5 commentaires:

Anonyme a dit…

Rhaah...diable! Un peu de grandeur dans ce médiocre humus.

Rions sous cape, il fut un temps où l'époque ne cherchait pas à être "cool" absolument. Bocks et épées dans la cavalerie.

Ils maniaient le sabre, nous jouons au ping-pong.

Anonyme a dit…

La classe l'ancêtre! :) Hardi les gars, vire au guindeau
Goodbye farewell, goodbye... hm.

:)

ubifaciunt a dit…

@ M. D'Artagnan père : A moi, mousquetaires !!!

@ grandk : hélas ce n'est pas le mien d'ancêtre (ce qui eut voulu dire le tien aussi, hi hi)

Anonyme a dit…

L'ancêtre en question c'est Surcouf, t'es trop crédible!

ubifaciunt a dit…

Perdu ! Surcouf était malouin et non cherbourgeois...